Déclaration préalable de la FSU CTA du 18 octobre 2016

Cette rentrée se déroule, à bien des égards, dans un contexte bien particulier : depuis plusieurs semaines, des remarques, pressions, et attaques remettent en cause le rôle émancipateur de l’école.
Déclaration du Pape et multiplication des interventions de groupes de pression dénonçant à chaque fois une supposée théorie du genre enseignée par l’école, déclarations très médiatiques des lobbys
patronaux contre les programmes de SES, prétendu enseignement obligatoire de l’arabe, notre système éducatif n’est pas épargné par les instrumentalisations en tout genre.

Il n’est pas anodin que celles-ci se multiplient à l’approche des élections présidentielles, et que la parole politique assigne
aussi de son côté un rôle bien particulier à l’école notamment dans l’enseignement de l’Histoire. La FSU rappelle que l’école est le lieu de construction de l’individu et du futur citoyen grâce à des savoirs émancipateurs et qu’à ce titre, elle doit être préservée des pressions et instrumentalisations politiques et politiciennes.
Le contexte est aussi bien compliqué pour l’École avec les menaces bien réelles qui pèsent dans et aux abords des écoles et établissements scolaires. La volonté de les sécuriser est légitime mais il importe de ne pas générer un climat anxiogène, par une communication pesante sur les risques d’intrusions ou des exercices PPMS intrusion attentat aux conséquences mal maîtrisées pour les
élèves et les personnels. Un bilan de cette campagne d’exercice devra être fait rapidement.
L’école est aussi l’un des principaux instruments de lutte contre les inégalités sociales. Elle doit se
donner les moyens de faire réussir tous les élèves, et ainsi d’annihiler le poids des déterminismes
sociaux. Mais alors, pourquoi la Ministre de l’Education Nationale s’obstine t-elle donc à refuser
toute discussion autour d’une nouvelle carte des lycées de l’Education Prioritaire ? Les difficultés
scolaires, économiques et sociales s’arrêteraient donc à la porte du lycée ?! Et pourtant il y a
urgence : la crise perdure, s’enlise et produit ses effets, en particuliers dans certains territoires de
notre académie. Il est donc incompréhensible que les lycées, généraux, technologiques et
professionnels, soient les grands oubliés de la Refondation de l’Education Prioritaire. La FSU
soutient les établissements actuellement mobilisés, plusieurs sections académiques du SNES-FSU et
du SNUEP-FSU, dont celles de notre académie, appellent à la grève le 17 novembre pour
revendiquer l’ouverture immédiate de discussions sur la construction d’une carte élargie des lycées
en Education Prioritaire, qui ouvrirait droit notamment à une dotation spécifique pour diminuer le
nombre d’élèves par classes, classe, qui permettrait de renforcer les équipes pluriprofessionnelles et
de stabiliser les équipes pédagogiques.
Il est tout aussi frappant de constater que ce sont bien souvent les établissements des territoires les
plus défavorisés qui ont pâtit des effets désastreux de la crise de recrutement qui perdure. Les
bassins de Sarcelles et Argenteuil ont ainsi concentré à eux seuls 41 des postes vacants en
mathématiques. Dans un collège de Grigny, début octobre, les 5eme n’avaient toujours pas
commencé les cours d’espagnol. Les chiffres du bilan du mouvement intra2016 sont édifiants : près
1029 postes vacants, contre 688 l’année précédente. Les solutions proposées par le Rectorat ne
fonctionnent pas, comme le montre les chiffres du recrutement sur un mouvement spécifique REP+
que nous continuons de dénoncer, ou relèvent de plus en plus du bricolage institutionnalisé : aux
désormais tristement traditionnelles annonces sur le site de Pôle Emploi et du Bon Coin, on peut
désormais ajouter les annonces institutionnelles relayées par l’ambassade de France en Espagne et
l’ambassade d’Uruguay en France ! Pour qui en doutait encore, tout montre qu’il y a urgence à
mettre en place des pré-recrutements et à rendre réellement nos métiers attractifs en revalorisant nos
salaires et nos conditions de travail. A cet égard, on notera que les débuts de carrière sont les grands
oubliés de mesures issues des négociations dans le cadre du PPCR. Si, grâce à l’action de la FSU, la
profession va bénéficier dans son ensemble d’un début de revalorisation salariale, il y a encore fort
à faire, notamment pour les entrants dans le métier. Par ailleurs, les incertitudes qui pèsent sur la
mise en oeuvre de ces mesures, renvoyées pour beaucoup à l’après 2017, ne peut que renforcer notre
détermination à continuer la mobilisation pour une revalorisation d’ampleur de nos métiers.
L’attractivité de nos métiers dépend également des conditions de travail, et de ce point de vue, la
rentrée 2016 dans notre académie ne fait malheureusement pas figure d’exception par rapport aux
précédentes, notamment parce que les classes sont toujours aussi chargées, voire plus. Pourtant,
cette pression démographique était prévisible, qu’elle soit du à l’augmentation du nombre d’élèves
dans certaines cohortes, ou aux conséquences de certaines décisions ministérielles (comme la fin du
redoublement en 2de). Et puisque « gouverner c’est prévoir », comment expliquer alors ces
créations de classes jusqu’à la mi-septembre ? Comment justifier cette pratique du surbooking
jusqu’ici l’apanage des compagnies aériennes low-cost ? Comment l’administration peut-elle
s’accommoder de classes à 35 ou 36 élèves, souvent en 1ère STMG, plaçant des élèves, souvent
fragiles, dans des conditions peu propices à leurs réussites ? Les personnels, eux, ne s’en
accommodent pas comme le montrent les mobilisations de rentrée dans plusieurs lycées, soutenus,
par la FSU (lycée Corot dans l’Essonne, lycée Cassin dans le Val d’ Oise). Nous ne pourrons
accepter que de telles conditions de rentrée soient de nouveau imposées aux élèves et aux
personnels à la prochaine rentrée. Par ailleurs, comme tous les ans, l’accueil des élèves doublants de
terminale a été très compliqué, voire même plus compliqué, alors même qu’un texte ministériel
offrait de nouveaux droits aux lycéens ! Tous ces exemples illustrent à quel point le second degré
reste sous tension, faute de moyens à la hauteur des besoins, à quel point les inégalités scolaires
perdurent et parfois s’aggravent, en particulier dans notre académie. Comment invoquer la
Refondation de l’Ecole quand les conditions d’enseignement et d’études se sont dégradées ?
En collège, la mise en place de la réforme révèle toutes les insuffisances et incohérences pointées
par les syndicats de la FSU depuis des mois. L’enquête menée par l’observatoire mis en place par le
SNES révèle plusieurs constantes : de l’AP en classe entière, des groupes moins nombreux en LCA,
des horaires disciplinaires en baisse, des emplois du temps complexes et déroutants pour les élèves,
des compléments de service en nette augmentation…Les personnels sont déjà épuisés après deux
mois de cours en raison de la surcharge de travail imposée par cette réforme mais aussi en raison de
la mise en oeuvre simultanée de 4 programmes et des nouvelles modalités d’évaluation des élèves.
Les discours de démobilisation sont de plus en plus nombreux : perte de sens du métier,
dénaturation des pratiques professionnelles, le malaise de la profession doit être entendu. Il ne peut
être traité à coup d’éléments de langage ministériels ou de slogans médiatiques qui ne font
qu’exacerber les crispations et les tensions. Il y a urgence à rouvrir ce dossier : les syndicats de la
FSU sont prêts à y porter leur projet ambitieux pour le collège.
Dans le premier degré, découragement et lassitude dominent également. Le déficit en personnels
rend difficile le quotidien pour les élèves et les personnels et empêche même ces derniers de
bénéficier de droits dont ils bénéficient dans d’autres académies (disponibilité, congé formation etc).
Ce qui s’est passé pour les opérations complémentaires de changement de département l’année
dernière est un exemple d’une gestion managériale et contre-productive, qui fait souffrir les
personnels sans pour autant répondre aux besoins du service. En effet, pour la première fois, vous
vous êtes opposé à des décisions ministérielles de mutation de 12 enseignants de l’académie,
mutations qui avaient été décidées dans le cadre d’un groupe de travail ministériel portant sur les
situations personnelles difficiles. Il a fallu 2 mois d’interventions du SNUipp-FSU au niveau
départemental, académique et national pour que ces enseignants bénéficient finalement de leur
mutation, après nombre d’informations contradictoires qui les ont plongés dans une situation
d’incertitude insupportable. Le message envoyé à la profession a été bien plus nocif pour
l’attractivité de l’académie que la « perte » de 12 enseignants.
A cela s’est ajoutée la décision du Ministère, toujours en accord avec vous, de bloquer également de
manière brutale et sans préavis les départs pour enseigner à l’étranger. Les détachements et les
contrats locaux étaient pourtant jusque là le seul moyen pour des enseignants de l’académie de
Versailles d’enseigner ailleurs que dans le département pendant quelques années de leur carrière.
La rentrée 2016 a confirmé le manque d’attractivité de nos métiers. Comme dans le 2d degré, le
déficit en personnels, loin de se résoudre, continue de s’aggraver, comme le montre le nombre élevé
de postes non pourvus au concours. Plusieurs centaines de contractuels ont été embauchés avant
même la rentrée scolaire, certains l’ont été depuis fin septembre et d’autres le seront encore dans les
prochaines semaines.
Tous les collègues, quelle que soit leur mission évoquent une charge de travail qui ne cesse de
s’alourdir avec sans cesse de nouvelles tâches à accomplir. La liste est longue, entre les obligations
liées au travail pédagogique, aux liens avec d’autres professionnels et aux nouvelles demandes de
l’institution.
Aujourd’hui, ce toujours plus qui est demandé, sans les moyens permettant d’y répondre, n’est plus
accepté par les personnels. Ceux-ci font face, comme ils le peuvent, à ces demandes multiples et le
cadre annuel des 108 heures explose. Il faut donc que le temps de travail « invisible » soit reconnu
et redéfini. Cela passe dans un premier temps par la récupération du temps des APC.
Dans son dernier courrier, la Ministre mentionne l’intérêt qu’elle porte à la question du temps de
travail. Afin d’obtenir l’ouverture de discussions sur nos obligations réglementaires de service, le
SNUipp-FSU au niveau national appelle l’ensemble des collègues à suivre sa consigne syndicale de
ne plus mettre en place les APC. Cette question est désormais entre les mains de la Ministre.
Cette rentrée se déroulait dans un contexte bien particulier aussi parce qu’elle était la dernière de ce
quinquennat. A l’image des précédentes, et au regard de ce bilan elle restera comme celle des
espoirs déçus.